Le 12 décembre 2024, des partenaires LYSiERES² ainsi que des membres d’une association lyonnaise d’auteurs et autrices de BD se sont réunis sur le campus Rockfeller pour visiter les collections du Droguier de la Faculté de pharmacie de Lyon (ISPB).
Qu’est-ce qu’un droguier ?
Les responsables scientifiques des collections, Isabelle Kerzaon, Kévin Ortel et Marie-Geneviève Dijoux-Franca, nous ont tout d’abord proposé de définir ce terme qui évoque communément des substances psychotropes ou psychoactives : nicotine, morphine, héroïne… des molécules modifiant l’état de conscience et pouvant susciter une dépendance. Pourtant, avant 1950, une drogue désigne une substance d’origine naturelle ou chimique pouvant être transformé en médicament. Aujourd’hui, on peut étendre les drogues aux produits ayant des propriétés médicamenteuses, employés tels qu’ils existent dans la nature ou après des opérations n’exigeant pas de connaissance pharmaceutique.Ainsi, un droguier est un mobilier (un meuble) ou un espace (une pièce entière) conservant des substances aux propriétés médicinales mais également alimentaires, toxiques et à usages industriels (savonnerie, parfumerie, textile…). À partir de la fin du XVème siècle, des médecins se sont mis à collectionner plantes, animaux et végétaux pour inventorier leurs différentes utilisations médicales dans des ouvrages, créant ainsi les premiers droguiers.
L’histoire du Droguier de l’Institut des sciences pharmaceutiques et biologique (ISPB)
Les collections sont constituées à partir de 1821, en même temps que les différentes institutions d’enseignement de la Pharmacie à Lyon dont elles ont dû suivre les nombreux déménagements, de l’Hôtel Dieu, en passant par les quais Claude Bernard, jusqu’au site Rockfeller où elles sont actuellement conservées.En 1934, lors du premier inventaire, 744 échantillons sont répertoriés. Aujourd’hui, on en compte environ 5000 dont une grande majorité d’origine végétale.
Un lieu unique, historique et vivant
Le Droguier patrimonial de l’ISPB est organisé en différents espaces thématiques illustrant la variété des échantillons, de leur forme, de leurs propriétés ou encore de leur utilisation. On y retrouve de grandes armoires vitrées exposant les drogues conservées dans divers types de pots selon l’époque et le lieu où elles ont été collectées et dans lesquels les pharmaciens et pharmaciennes piochaient pour préparer en direct les médicaments. Certains échantillons sont gardés dans des tiroirs en bois qui ont beaucoup intrigué les visiteurs et visiteuses.De nombreux produits exposés ne sont aujourd’hui plus utilisés car des alternatives synthétiques, plus simples et moins coûteuses à fabriquer, ont été trouvées depuis. Par exemple, les yeux d’écrevisses ont été remplacés par le bicarbonate pour soulager l’acidité gastrique ; l’acide carminique contenu dans les cochenilles, autrefois utilisé dans l’industrie textile, est aujourd’hui synthétisé.
Le Droguier abrite également quelques curiosités accumulées au cours de son histoire : des échantillons n’ayant pas de propriétés médicinales mais qui illustrent bien la variété des formes de la nature. La carapace de tortue et la graine de coco fesse en particulier attirent naturellement les visiteurs et visiteuses et sont l’occasion de partager des anecdotes inédites.
La conservation est un enjeu important au Droguier qui peut malheureusement faire face à des problèmes de conservation dus aux insectes, notamment les poux de livres. À l’exception des visites, il est gardé à l’abri de la lumière naturelle qui peut détériorer les échantillons.
Ce lieu vivant est financé exclusivement par les subventions d’appels à projet auxquels répondent les responsables scientifiques. Le dernier a permis la conception d’un espace interactif autour du contrôle des drogues végétales au sein du Droguier. En effet, il peut arriver qu’un échantillon végétal soit vendu sous un faux nom pour faire plus de bénéfices mais qu’on ne puisse pas vérifier son authenticité à l’œil nu. Ici, les visiteurs et visiteuses peuvent observer au microscope des coupes histologiques (c’est-à-dire des tissus) de végétaux et les comparer pour déterminer si un échantillon est falsifié. Les lames de microscopes observables et les échantillons macroscopiques exposés sous vitrines peuvent être facilement changés, rendant ainsi ce module adaptatif et interactif.
La médiation scientifique au Droguier de l’ISPB
Le Droguier patrimonial de l’ISPB est ainsi une collection vivante qui permet de faire vivre et de faire découvrir le patrimoine scientifique de l’Université, l’histoire et la variété des matières médicinales. Au-delà de la conservation d’échantillons historiques, ce lieu transmet des connaissances sur la pharmagnosie (l’étude des drogues au sens large) en ouvrant ses portes au grand public et aborde les risques et les dangers de l’utilisation sauvage des plantes.
Merci à l’Institut des sciences pharmaceutiques et biologiques de l’Université Claude Bernard Lyon 1 et à l’équipe du Droguier patrimonial de nous avoir accueillis.