Mise à jour le 01 oct. 2024
Publié le 28 juin 2024 Mis à jour le 1 octobre 2024

Le champ de la santé est véritablement propices aux recherches participatives. De Lyon à Bruxelles, du Canada au Mali, présentation de quelques recherches inspirantes qui nous permettent de mieux comprendre la participation de citoyens dans des projets de recherches.

Depuis quelques semaines, dans le cadre du projet Lysières², un benchmark de recherches participatives inspirantes en santé est réalisé. Définie par la Charte des recherches participatives en France comme "des formes de production de connaissances scientifiques auxquelles participent, avec des chercheurs,des acteurs de la société civile, à titre individuel ou collectif, de façon active et délibérée", ces recherches contribuent à modifier de manière importante les relations entre Sciences et société.

Retour sur 11 recherches inspirantes (faites en France, mais aussi au Canada - pays à la pointe des recherches participatives -, en Belgique et au Mali) pour mieux comprendre la diversité de ces nouvelles collaborations entre chercheuses, chercheurs, citoyennes et citoyens.
 
Capdroits : "Rien sur nous, sans nous" (Auvergne-Rhône-Alpes)
La nécessaire participation des personnes en situation de handicap à la vie publique, notamment par rapport à l'exercice de leurs droits, est un principe réaffirmé par l'ONU. Pourtant, bien souvent, la mise en application effective de ces droits est difficile.

Ainsi, la démarche Capdroits est née en 2015. Elle ambitionne de favoriser l’exercice des droits (notamment civiques) des personnes en situation de handicap. Pour cela, elle mise sur une méthodologie propre : la mise en problème publique de l’expérience, afin de partir de situations individuelles rencontrées par les participantes et participants à une généralisation des vécus pour construire collectivement des cadres d’analyses et de revendications.

Capdroits prend place dans 10 villes différentes en France. Chaque groupe est animé par un trinôme composé d’une chercheuse ou chercheur académique, d’une professionnelle ou d’un professionnel de l’accompagnement et d’une personne concernée.

Pour aller plus loin :

Porté scientifiquement par Benoit Eyraud, sociologue au Centre Max Weber (Université Lumière Lyon 2)

Avec les membres de l’association CapDroits, regroupant chercheurs, des professionnels de l’accompagnement et des personnes concernées

Santé des gens du voyages : Influence de l’environnement et inégalités en Santé chez les voyageuses et voyageurs (Nouvelle-Aquitaine)
Les voyageuses et voyageurs sont soumis à des inégalités de santé importante. Leur espérance de vie est en moyenne 10 ans inférieure au reste de la population.

Face à ce constat, Santé Publique France a construit, avec la Fédération Nationale des Associations Solidaires d’Action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (Fnasat) un programme de recherche. Son but : mieux comprendre l’état de santé des voyageuses et voyageurs, ainsi que les inégalités de santé qu’elles et ils subissent. L’impact de l’environnement – avec des aires de vie situées dans des zones peu propices – est aussi étudié.

Cette enquête par entretien a été administrée par les associations membres de la FNASAT. Les voyageuses et voyageurs ont pu définir, lors de temps collectifs, les priorités de l’enquête et coconstruire les outils méthodologiques les plus efficients.

Pour aller plus loin :
Porté scientifiquement par Stéphanie Vandentorren épidémiologiste à Santé Publique France

Avec la Fédération Nationale des Associations Solidaires d’Action avec les Tsiganes et les Gens du voyage (Fnasat)
EPSEAL Fos : enquêter sur la santé environnementale dans une ville industrialo-portuaire (Bouche-du-Rhône)
L’Etang de Berre est connu pour son importante industrie portuaire. Cette activité n’est pas sans conséquence sur l’environnement mais aussi sur la santé des personnes qui vivent et travaillent à proximité. C’est dans ce cadre qu’une recherche participative est née de la rencontre de chercheuses et chercheurs et des habitantes et habitants.

Le projet EPSEAL se propose de renseigner l’état de santé de ces habitantes et habitants en lien avec l'environnement comparant les situations à Fos-sur-Mer, St-Martin-de-Crau et de Port-Saint-Louis.
L’enquête s’est principalement déroulée par questionnaire : 1250 ont été passés. Des observations sont venues compléter les données.

Des ateliers participatifs ont été aussi construits pour soutenir la recherche, sur des missions variées : présentation des résultats, proposition d’analyses supplémentaires et complémentaires à celle des chercheuses et chercheurs, recommandation concernant la présentation des résultats

Pour aller plus loin :
Porté scientifiquement par Barbara L. Allen, sociologue à Virginia Tech University et Johanna Lees, socio-anthropologue au Centre Norbert Elias

Avec l’Institut Ecocitoyen 
CiTique : un crowsourcing autour de l’écologie des tiques ! (Grand-Est)

Le projet CiTique ambitionne de mieux comprendre l’écologie des tiques et les maladies qu’elles transmettent et mieux saisir où et comment les personnes sont piquées.

Tout le monde peut envoyer les tiques qui les ont piqués au laboratoire de l’INRAE Grand Est afin qu’elles soient analysées pour connaitre le statut pathologique et recenser les lieux de piques. Au total, 50 000 tiques ont été récoltés et conservées, 60 000 signalements de piqures ont été effectués, créant ainsi, grâce à la participation citoyenne, l’une des plus grandes tiquothèque existante.

Parmi les résultats inédits : près d’un tier des piqures ont lieu dans son jardin.

Pour aller plus loin :

Porté scientifiquement par Pascale Frey-Klett, phytopathologiste à l’INRAE Grand-Est

Avec Des Hommes et des arbres, Vigie Nature, Hopitaux de Strasbourg (Centre National Référence Borrelia) ; ARIENA, Graine Grand-Est, ANVA, Scouts Guides France, Office National des Forêts, DRDJSCS, Préfecture de la région Pays de la Loire, Flore 54, GRAINE Languedoc-Roussillon, Parc Nationale des Pyrénées, Observatoire de la biodiversité en Auvergne-Rhône-Alpes (Pôle Invertébrés), Centre socioculturel du pays de Thann, ASP Forêt de Haye, LADYSS, ville de Béziers.
Makasi : promouvoir la santé sexuelle (Île de France)

Les immigrées et immigrés caribéens et subsahariens sont surreprésentés dans les nouvelles infections par le VIH en France. La précarité dans lesquels elles et ils vivent une fois arrivés en France explique en très grande partie cet écart.

Le Projet Makasi, en lien avec 2 associations (Afrique Avenir et ARCAT), ambitionne de construire une intervention de promotion de la santé sexuelle et de prévention face au VIH.

Ces interventions sont autant un temps de recueil de données précieuses pour adapter les modèles de santé que des moments de présentation de conseil de prévention en santé sexuelle. Ils sont effectués par les travailleuses et travailleurs sociaux des associations participantes à l’étude.

La logique est, ici, celle du renforcement des pouvoirs d’agir des personnes participantes aux interventions.

Pour aller plus loin :
Porté scientifiquement par Annabel Desgrées du Loû, démographe au CEPED

Avec Afrique Avenir et ARCAT

Ancolie : comprendre les effets cognitifs des hormonothérapies (Lyon)
Le projet Ancolie a commencé en 2022. Son but ? Mieux connaitre les effets cognitifs sur les femmes atteintes d'un cancer suivant un traitement par hormonothérapie.

Elle a mis en lien, au sein du groupe Impaqt, des chercheuses en psychologie sociale et des femmes atteintes d’un cancer. Ce sont ces dernieres qui ont identifié un thème pour la recherche, en partant de leurs expériences.

Les membres d’Impaqt ont été présentes dans toutes les étapes de la recherche : choix de la question de recherche, discussion de la méthodologie, recueil des données ou encore analyse des résultats.
Porté scientifiquement par Myriam Pannard, psychologue sociale à Radiations - POPS (université Lumière Lyon 2)

Avec l’Association Les Sentinelles
EPIC : comprendre la syndémie COVID-VIH (International)
Quels effets a eu la pandémie de COVID19 alors qu’une autre pandémie est encore en cours, celle du VIH ?

La Coalition Plus a lancé le programme de Recherche EPIC, avec les associations agissant sur le Sida dans plus de 32 pays.

Pour répondre aux questionnements que crée cette syndémie et s’adapter au plus proche des réalités nationales de chaque pays, EPIC propose une méthodologie très agile bâtie autour de modules thématiques de questionnaires ou d’entretiens dans lesquels les associations partenaires du programme piochent.

Au total : 67 enquêtes quantitatives (pour 13 352 répondantes et répondants) et 52 enquêtes qualitatives (pour 922 enquêtées et enquêtés) ont été réalisé depuis le lancement de cette recherche en 2022, permettant de mieux saisir l’actualité mondiale et les dynamiques de l’épidémie de SIDA.

Pour aller plus loin :
Porté scientifiquement par Coalition Plus et le Laboratoire de Recherche Communautaire

Avec Arcad-Santé Plus (Mali), ALCS (Maroc), AIDES (France), Kimirina (Equateur), ANSS (Burundi)
Participate Brussels : une recherche sur la personnalisation des soins auprès de malades chroniques (Belgique)
Participate Brussels ambitionne d’améliorer la personnalisation des soins des personnes vivantes avec des maladies chroniques. Sujet majeur, la personnalisation des soins est l’un des piliers de la médecine 5P (comme Préventive, Participative, fondée sur des Preuves, Prédictive, Personnalisée).

Ce projet s’appuie sur des entretiens compréhensifs menée auprès de malades et de professionnelles et professionnels afin de comprendre, respectivement, les activités qu’ils font pour entretenir leur santé et les questionnements qu’ils se posent autour du système de santé à Bruxelles. Discuté et analysé par la suite collectivement, ces résultats ont ensuite donné lieu à des propositions d’actions que les associations partenaires ont pu tester ou insérer dans leurs plaidoyers.

Dans cette enquête Daniel Simar, personne concernée, officiait comme co-chercheur. Les données de santé restaient hautement confidentielles. Si une chercheuse ou un chercheur pensait reconnaitre quelqu’un, il leur était demandé de laisser la retranscription des entretiens à quelqu’un d’autre.

Pour aller plus loin :
Porté scientifiquement par Isabelle Anjoulat, docteure en Santé Publique à l'IRSS de Louvain

Avec, InnovIris Brussels, Association Parkinson ; Cliniques Universitaires Saint-Luc ; Cultures & Santé ; Fédération d’Aide et de Soins à Domicile ; Mutualité chrétienne ; Plateforme pour l’amélioration continue de la Qualité des Soins et de la Sécurité des patients (PAQS) ; Promosanté et Médecine générale ; Hôpitaux Iris-Sud ; Soins chez Soi ; Maison Médicale du Béguinage
Ramed : mieux connaitre une politique sociale d’accès à la santé (Mali)
Le Mali a mis en place l’une des politiques sociales les plus ambitieuse d’Afrique en matière d’aide médicale, avec le Ramed, un couverture santé qui permet d’accompagner les 5% des plus pauvre du pays dans leurs parcours de soin. Pourtant, cette aide n’est que peut utilisé.

Ainsi, ce projet de recherche veut comprendre le fonctionnement actuel du Ramed, ses forces mais aussi ses faiblesses, afin de le rendre plus accessible et plus efficace. Initiée par les pouvoirs publics et confiée au Miseli, cette recherche s’est construite autour de Focus-group, permettant de recueillir les perceptions locales du dispositif.

Pour autant, cette recherche ne prend pas en compte les perceptions des premières concernées et des premiers concernés, ces dernières et derniers restant en marge du travail en train de se faire sur elles et eux, mais mobilise un large panel de cadre des institutions maliennes. Cela offre une perspective institutionnelle intéressante.
Porté scientifiquement par Laurence Touré, anthropologue au Miseli

Avec l’ANAM (Agence Nationale pour l’Assistance Médicale (Mali)) et le CRDI (Centre de recherche pour le développement international)
Répit en Wallonie : prévenir l’épuisement des parents-aidants (Belgique)

Au début des années 2000, une résolution fédérale prévoyait l’ouverture de 30 lits de répit en Belgique. 20 ans après, si ces lits ont effectivement été mise en place en Flandre et à Bruxelles pour mettre de lutter contre l’épuisement des parents, cette option n’existe pas encore en Wallonie.

C’est face à cette situation que le Centre Hospitalier Chrétien de Liège a impulsé une recherche participative pour prévenir l’épuisement des parents-aidants, par la création notamment d’un lieu de répit.

Cette recherche a donné lieu à de nombreux entretiens, auprès de parents et de professionnelles et professionnels vivant dans la région de Bruxelles. Un second temps a été consacré à des séminaire de co-construction où les participantes et participants discutaient des premières pistes d’analyse.
Porté scientifiquement par Anne-Catherine Dubois, docteure en Science de la Santé Publique à l'IRSS de Louvain

Avec Fondation France-Répit, Centre Hospitalier Chrétien (CHC) de Liège

Digicit : Penser les conditions de réussite d’une application de traçage anti-covid (Québec)
La gestion de la pandémie du COVID à donner une grande place à la stratégie « tester, tracer, isoler » pour tenter de limiter les expositions et les contaminations. Dans cette logique, nombres d’application de traçage des contacts ont été développées. C’est le cas d’Alerte-Covid au Québec.

Pour autant, ces applications ont été peu utilisées. Ainsi, la recherche participative DigiCit s’est proposée de mieux comprendre les conditions de réussite d’une application de traçage anti-covid.

L’enquête s’est déroulée par questionnaire : 12 personnes aux profils volontairement variés ont coconstruits ce questionnaire en proposant des questions et en le retravaillant. Par la suite, des temps ont été organisés pour discuter des résultats et formuler des analyses.

DigiCit est une recherche transdisciplinaire. Elle mobilise des profils hétérogènes de chercheurs, allant de la médecine aux sciences sociales : médecins, sociologue, politiste, informaticien, mais aussi patient-expert.
Porté scientifiquement par Elsi Osmanlliu, pédiatre

Avec le Centre d’excellence sur le partenariat avec les patients et le public (CEPPP), l’Institut du Nouveau Monde (INM), de l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS)